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Publié sur le site en 2022


Les conséquences sur la prise en charge clinique


    Dans le travail avec des patients qui ont des symptômes que l'on pense avoir un lien avec ce mécanisme pathogène, proposer de l'association libre ciblée, est une option intéressante. En effet, Freud dans la psychanalyse, a eu l'intuition géniale qu'il fallait sortir de la réflexion logique pour travailler avec ce qui nous est caché de nous même, pour aborder ce qui est vécu comme inabordable, ce qui c'est structuré en soi comme inabordable. Cela concerne donc aussi les pulsions interdites1, sujettes soit au refoulement soit à la répression pathologique. Il a donc eu l'idée géniale de proposer comme technique de base de son approche thérapeutique l'association libre. C'est à dire laisser s'enchainer librement dans son esprit en les verbalisant, les idées, les images, les sensations, les émotions, les pensées, qui viennent spontanément sans opérer aucune censure. Et fatalement des motions pulsionnelles réprimées ou refoulées mais faisant retour viendront à la conscience associées à un certain malaise pouvant donner lieu à interprétation.

L'association libre ciblée est la même méthode mais dont le mode d'entrée est une thématique ou une situation ou une pensée, enfin tout élément clinique qui semble important. Pour ce qui est du matériel refoulé faisant retour, Freud évoque comme mécanisme générant le symptôme l'idée de formation de compromis au sein de l'appareil psychique pour gérer un élément pulsionnel interdit faisant retour à la conscience. L'association libre permet de mettre au jour des motions pulsionnelles inconscientes générant du conflit intrapsychique générant du symptôme. La prise de conscience de cela permettant de libérer la tension interne, rendant le symptôme inutile.

Et en ce qui concerne le matériel pulsionnel sous le joug de la répression pathogène, l'objectif de ce travail d'association libre ciblée est de faire expérimenter progressivement à la personne le fait que l'on peut évoquer cette pulsion ou ce qui l'entoure, sans danger dans la relation. Ainsi, au moins pendant le temps des séances dans un premier temps, en assouplissant le tabou mis sur cette pulsion, la relation thérapeutique va permettre de lever le mécanisme de répression pathologique et relancer le mécanisme de traitement psychique adapté de la pulsion (transformation psychique).

Il me faut repréciser que je différencie très clairement ce qu'on appellerait l'interdit surmoïque de l'interdit structurant de la loi. Cette différence renvoie à la différence que l'on peut faire entre la morale et l'éthique. Pour moi l'interdit de la loi vient pointer et interdire ce qu'il n'est pas possible de faire pour garantir à chacun la possibilité de vivre en sécurité physique et psychique dans l'espace commun grâce à un respect mutuel. Alors que l'interdit surmoïque vient pointer ce qui est interdit dans un groupe d'appartenance. Cet interdit est dicté arbitrairement par quelqu'un ou par une communauté, qui va exercer ainsi son pouvoir sur les autres membres. C'est cet interdit-là qui peut créer un tabou, non discutable.

Cet aspect tabou, quand il pose sa chape sur une pulsion, en empêchant d'évoquer cet enjeu pulsionnel, en bloque le traitement psychique. Ne reste alors plus que la répression pathologique pour la gérer intérieurement car pour qu'une pulsion puisse être traitée, transformée par l'appareil psychique, il faut la parler. L'interdit se dit, s'énonce, le tabou ne peut que se passer sous silence. Nommer ce qui est possible et ce qui n'est pas possible concernant une pulsion permet de la traiter psychiquement. C'est la voie que la psychanalyse a ouvert au travers de sa méthode si singulière : l'association libre et l'analyse du transfert.

Un patient va pouvoir aborder des éléments pulsionnels écrasés en lui sous la répression pathologique grâce à la technique d'association libre, qui libère de la contrainte de l'interdit surmoïque car il est accepté dans cette consigne que tout ce qui vient doit être dit et sera accepté, d'autant que l'on en est pas coupable car cela vient de l'inconscient. Il n'y a donc potentiellement plus « d'interdit à dire » dans l'espace relationnel particulier de la séance. L'idée que c'est l'inconscient qui parle est une sorte d'affranchissement par rapport à ce qui sera dit. Puis grâce à l'observation et à l'analyse de ce qui se passe dans le transfert, c'est à dire entre la personne et son psy, quand il aborde ces éléments pulsionnels interdits en lui, si générateur de honte, de dévalorisation de lui-même, de culpabilité et d'auto punition, il lui sera permis d'expérimenter et ce de manière renouvelée à chaque fois, le fait que cette personne (le psy) ne l'accable pas et même l'engage à le faire et continue à l'accepter en tant que sujet quand il le fait. Cela va lui permettre progressivement de recommencer à parler et même penser cette motion pulsionnelle. Et c'est un préalable nécessaire à la relance du traitement psychique de cette pulsion. L'analyse des résistances, des blocages et des censures dans les associations vient aider à mettre le doigt sur ce qui ne peut pas se dire, pourquoi cela ne peut pas se dire, et éventuellement quelle motion pulsionnelle sous-tend cet impossible à dire. La relance du travail psychique de transformation sur une motion pulsionnelle, libérant la tension psychique, l'énergie psychique, utilisée pour lutter contre le retour dans la conscience, ouvre à la libération du symptôme et à la possibilité que la pulsion puisse de nouveau être au service de l'instinct qu'elle vient garantir. Ce qui éliminera aussi cette angoisse probablement associée à l'enjeu fondamental de survie de l'espèce que chacun porte en soi au travers la nécessité de mettre en acte les instincts.

 

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